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Un salarié injustement accusé de vol a droit à réparation

Un employeur soupçonnait un chauffeur livreur de vol de carburant, l’intéressé prenant apparemment à la pompe plus de gazole que ce que nécessitait sa tournée. Il avait en conséquence adressé au salarié une convocation à un entretien préalable à un licenciement pour faute grave, assortie d’une mise à pied conservatoire. Néanmoins, au cours de l’entretien, le chauffeur avait fourni un certain nombre d’explications qui permettaient apparemment de dissiper les soupçons de vol (contenance du réservoir du véhicule supérieure à ce que pensait l’employeur, tournée plus longue que prévue).

L’employeur avait néanmoins maintenu son accusation et licencié le salarié pour faute grave. Il avait en parallèle déposé plainte (plainte qui fera finalement l’objet d’un classement sans suite).

Le conseil de prud’hommes puis la cour d’appel ont condamné l’employeur à indemniser le salarié pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Cependant, et c’est ce point qui retient plus particulièrement l’attention, le salarié a également obtenu le versement d’une indemnité complémentaire.

En effet, lorsque la rupture a lieu dans des conditions abusives ou vexatoires (propos dégradants, procédure brutale, etc.), ces circonstances entraînent un préjudice distinct de celui occasionné par la perte d’emploi. Ce préjudice est réparé par le versement d’une indemnité spécifique, dont le juge apprécie souverainement le montant (cass. soc. 1er février 1994, n° 89-42289 D). Cette indemnité se cumule donc, le cas échéant, avec l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (cass. soc. 27 novembre 2001, n° 99-45163, BC V n° 360 ; cass. soc. 15 mai 2002, n° 00-42371 D ; cass. soc. 21 novembre 2012, n° 11-23699 D). Ajoutons que le juge peut conclure au caractère réel et sérieux du motif de licenciement et néanmoins condamner l’employeur pour rupture vexatoire (cass. soc. 7 juin 2000, n° 98-44284 D).

Dans cette affaire, le conseil de prud’hommes a estimé que le fait d’avoir accusé le salarié de vol alors que ce motif n’était manifestement pas établi et d’avoir en outre déposé plainte contre l’intéressé caractérisait un licenciement abusif et justifiait une indemnité particulière, d’un montant de 10 000 €. La cour d’appel a confirmé cette interprétation, tout en revoyant à la baisse l’évaluation du préjudice subi : l’employeur a finalement été condamné à verser 1 000 € de dommages et intérêts.

CA Bastia 8 novembre 2017, ch. soc., n° RG 16/00284 ; https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000036059002&fastReqId=386138945&fastPos=24&oldAction=rechExpJuriJudi

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