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Travail de nuit

Le travail de nuit doit être indispensable au fonctionnement de l’entreprise, sinon gare au retour de bâton

Un employeur qui licencie un salarié travaillant de nuit pour un motif réel et sérieux, mais sans que le recours au travail de nuit dans l’entreprise ne soit justifié, n’échappera pas au versement de dommages et intérêts au titre de l’interdiction du travail de nuit.

Le recours par l’employeur au travail de nuit est strictement encadré. Il doit impérativement respecter les principes suivants (c. trav. art. L. 3122-1) :

-être exceptionnel ;

-tenir compte des impératifs de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ;

-être justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique ou des services d'utilité sociale.

Il en résulte que le travail de nuit ne peut pas constituer un mode normal d’organisation du travail au sein d'une entreprise et ne doit être mis en œuvre que lorsqu'il est indispensable à son fonctionnement (cass. soc. 24 septembre 2014, n° 13-24851, BC V n° 2015).

Même si l’entreprise est couverte par un accord d’entreprise ou de branche autorisant le travail de nuit, ces principes, qui sont d’ordre public, doivent être respectés. En particulier, il faut que la poursuite de l’activité économique de l’entreprise nécessite de faire travailler les salariés la nuit.

C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt du 30 janvier 2019.

Dans cette affaire, un ouvrier employé dans une société de fonderie, ayant 3 ans d’ancienneté, avait été licencié pour insuffisance professionnelle. Il avait, durant une nuit de travail, produit des pièces défectueuses sans exercer de contrôle qualité, lesquelles avaient été ensuite livrées au client.

Le salarié avait saisi la justice pour contester le bien-fondé de son licenciement, mais également pour réclamer 10 000 € de dommages et intérêts à son employeur pour violation de l'interdiction du travail de nuit.

Sur ce second point (le seul qui retiendra notre attention, le licenciement du salarié ayant été validé par la Cour de cassation), le salarié faisait valoir que le travail de nuit n'avait rien d'exceptionnel et n'était pas justifié par l'activité économique de l'entreprise.

Mais la cour d’appel a rejeté sa demande au motif que le travail de nuit dans les entreprises de métallurgie est prévu par l'accord collectif du 3 janvier 2002 et que cet accord rappelle la nécessité d'y recourir pour assurer la continuité de l'activité économique.

Pour la Cour de cassation, la cour d’appel est allée trop vite en besogne en ne recherchant pas, comme il lui était demandé, si le recours au travail de nuit au sein de la société était justifié par la nécessité d'assurer la continuité de l'activité économique et était indispensable à son fonctionnement.

Elle rappelle que le travail de nuit ne peut pas être le mode d'organisation normal du travail au sein d'une entreprise et ne doit être mis en œuvre que lorsqu'il est indispensable à son fonctionnement.

La Cour de cassation a donc cassé l’arrêt de la cour d’appel. L’affaire sera rejugée par une nouvelle cour d’appel qui devra vérifier concrètement si la situation de l’entreprise nécessitait le recours au travail de nuit.

Si, au final, les juges considèrent que le travail de nuit n’était pas justifié, l’addition pourrait s’avérer salée pour l’employeur. Bien qu’ayant licencié le salarié pour un motif réel et sérieux, il n’échappera pas au versement de dommages et intérêts au titre de l’interdiction du travail de nuit.

Cass. soc. 30 janvier 2019, n° 17-22018 D

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