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Charte du football professionnel : reprise de volée et passement de jambes de la Cour de cassation

La rencontre du football professionnel et du droit du travail donne à voir un jeu nourri par les fondamentaux du droit, mais aussi par les règles du jeu particulières de la profession, comme le montre une nouvelle fois une affaire concernant un ancien joueur de l’équipe de Guingamp.

Dans un arrêt du 14 septembre 2016, la Cour de cassation rappelle, en reprise de volée, que sauf disposition légale contraire, une convention collective ne peut permettre à un employeur de procéder à la modification du contrat de travail sans recueillir l’accord exprès du salarié.

En février 2016, la Cour de cassation avait sur ce point déjà délivré un carton rouge à la charte du football professionnel, empêchant ainsi les clubs relégués en Ligue 2 de réduire la rémunération de leurs joueurs sans leur accord (charte du football professionnel, art. 761 ; cass. soc. 10 février 2016, n° 14-26147 FSPB).

Mais dans l’arrêt du 14 septembre 2016, c’est un autre point qui a le plus marqué le jeu de la Cour de cassation et sur lequel, pour changer, elle tacle le joueur.

Ce footballeur professionnel avait signé avec le club de Guingamp un contrat à durée déterminée (CDD) pour deux saisons, contrat qui avait été homologué par la Ligue de football professionnel.

Le lendemain de la signature du CDD, ils avaient conclu un avenant prévoyant que ce contrat serait prolongé d’une saison dans l’hypothèse où le joueur deviendrait titulaire ou serait entré en jeu un certain nombre de fois au cours des matchs officiels de la saison précédente. Cependant, l’avenant n’avait pas été soumis à l’homologation de la Ligue.

Lorsque le club a été relégué en Ligue 2 à l’issue de la première saison, le coach  a fait savoir au joueur que son contrat se terminerait à la fin de la deuxième saison, donc sans faire jouer la prolongation prévue par l’avenant. Puis, comme le joueur demandait le paiement de ses rémunérations relatives à la troisième saison, le club a changé de tactique et a soumis l’avenant à l’homologation. Mais la Ligue a refusé d’homologuer l’avenant.

La question posée à la Cour de cassation consistait à déterminer si un avenant non homologué par la Ligue pouvait recevoir application.

Pour la Cour de cassation, la charte du football professionnel, qui a valeur de convention collective, prévoit que tout contrat ou avenant, non homologué par la Ligue est nul (charte du football professionnel, art. 256, al. 1er).

Elle enchaîne en ajoutant que la Ligue participe à l’exécution d’une mission de service public administratif consistant à organiser, conformément au code du sport, la réglementation et la gestion de compétitions sportives (c. sport art. R.132-12). Dès lors, le refus d’homologation est un acte administratif qui s’impose au juge judiciaire.

Ainsi, dans la mesure où l’avenant n’avait pas été homologué et n’avait pas fait l’objet d’un recours, la cour d’appel avait valablement pu décider qu’il était nul et refuser de faire droit à l’action du footballeur.

À notre sens, pour éviter de se retrouver hors-jeu sur ce point et pouvoir se prévaloir de l’avenant prolongeant le CDD en matière prud’homale, le joueur aurait dû commencer par contester le refus d’homologation de cet avenant en saisissant les juridictions compétentes de l’ordre administratif…

Cass. soc. 14 septembre 2016, n° 15-21794 FSPB

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