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L'avant-projet de loi « El Khomri » veut corriger la procédure de contestation des expertises commandées par le CHSCT

Pour rappel, lorsqu’il existe un risque grave ou un projet important modifiant les conditions de santé, de sécurité ou les conditions de travail, le CHSCT peut décider de recourir à une expertise financée par l’employeur (c. trav. art. L. 4614-12).

En pratique, en cas de contestation de l’expertise par l’employeur, le cabinet désigné par le CHSCT attend la décision du président du TGI, qui statue en urgence. Ce n’est qu’une fois que l’expertise a été validée par le juge que le cabinet entame ses travaux, et ce même si l’employeur fait appel de la décision du président du TGI. En effet, l’expertise est une mesure d’urgence et ne peut pas être retardée indéfiniment. D'ailleurs, en cas de projet important, elle doit avoir lieu dans un délai maximal d’un mois (45 jours en cas de prolongation) (c. trav. art. R. 4614-18).

Or, ce dispositif pose difficulté dans la mesure où, même si l’employeur obtient finalement satisfaction et que l’expertise est jugée injustifiée, celle-ci restera à sa charge (cass. soc. 15 mai 2013, n° 11-24218, BC V n° 125).

Cette incohérence a conduit le Conseil constitutionnel à invalider les mécanismes de prise en charge financière et de contestation de l’expertise, avec effet au 1er janvier 2017, à charge pour les pouvoirs publics de les réformer d’ici là (c. constit., décision 2015-500 QPC du 27 novembre 2015, JO du 29).

L’avant-projet de loi relatif au code du travail, dit « El Khomri », tire les conséquences de la décision du Conseil constitutionnel et envisage un nouveau dispositif.

Ainsi, lorsque le juge judiciaire (TGI) serait saisi d’une contestation portant sur la nécessité de l’expertise, la désignation de l’expert, l’étendue ou le délai de l’expertise, il devrait statuer en « premier et dernier ressort » dans les 10 jours suivant sa saisine. Son jugement ne serait donc pas susceptible d’appel. L’employeur ne pourrait envisager qu’un pourvoi en cassation.

Cette saisine aurait pour effet de suspendre l’exécution de la décision du CHSCT jusqu’à l’expiration du délai de pourvoi en cassation. Ainsi, l’expertise ne pourrait pas débuter avant l’épuisement du délai de pourvoi en cassation, qui est en principe de 2 mois après la notification du jugement (c. proc. civ. art. 612).

En revanche, la difficulté reste entière si l’employeur forme un pourvoi en cassation, car il n’y a alors plus suspension et l’expertise peut avoir lieu pendant que la procédure judiciaire suit son cours, avec une fois encore le risque que l'expertise soit finalement jugée injustifiée. L’avant-projet de loi envisage cette hypothèse et précise qu’en cas d’annulation définitive de l’expertise,  l’expert devrait rembourser les sommes perçues. Cependant, le comité d’entreprise (CE) pourrait, à tout moment, décider de les prendre en charge. Cette prise en charge serait décidée par délibération du CE. Il est fort probable que les cabinets d’expertises auprès des CHSCT se garantiront par avance en demandant au CE de s’engager à régler les frais d’expertises en cas d’annulation de l’expertise.

L’avant-projet de loi place à part les contestations portant sur le coût de l’expertise. Celles-ci ne posant pas les mêmes problèmes pratiques, elles relèveraient de la procédure de droit commun applicable devant les juridictions judiciaires (en principe : TGI, appel puis cassation).

Enfin, signalons que la procédure particulière de contestation des expertises diligentées dans le cadre d’un projet de licenciement avec plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) ne serait pas modifiée (c. trav. art. L. 4614-12-1 et L. 4614-13).

Avant-projet de loi visant à instituer de nouvelles libertés et de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs (art. 18) ; http://revuefiduciaire.grouperf.com/plussurlenet/complements/PJL_18fev16_CE.pdf

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