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Cessions de titres

Etendue de l'obligation de loyauté du dirigeant

Les actionnaires minoritaires d'une société anonyme exploitant une clinique ont successivement vendu, en novembre 2005 puis en juin et juillet 2006, leurs actions au président du conseil de surveillance ainsi qu'à l'un des membres de ce conseil. En octobre 2006, l'intégralité des titres de la SA est ensuite revendue à une société tierce pour un prix nettement supérieur à celui auquel les minoritaires avaient préalablement cédé leurs actions. Les minoritaires saisissent la justice pour obtenir des dommages et intérêts de la part des dirigeants de la SA (présidents du directoire et du conseil de surveillance) et des acquéreurs de leurs titres. Il considèrent en effet que ceux-ci ont manqué à leur devoir de loyauté en leur dissimulant, lors de la cession de leurs titres, l'existence de négociations en vue d'une opération de rachat global des actions de la clinique.

Les juges du fonds ont condamné les dirigeants de la SA, reconnaissant qu'ils ont effectivement manqué à leur obligation de loyauté vis-à-vis des actionnaires minoritaires. De fait, les juges ont relevé que des projets d'expansion de la clinique et des opérations de rapprochement avec d'autres établissements de soins avaient été envisagés et débattus aux cours des mois ayant précédé la vente de leurs actions par les minoritaires et que, pendant la même période, des fonds d'investissement avaient racheté de nombreuses sociétés dans ce domaine d'activité tant sur le plan national que régional et avaient clairement annoncé leur volonté de s'étendre encore en réalisant de nouvelles acquisitions ; les dirigeants ne pouvant ignorer ces informations auraient dû en tenir informés les actionnaires, fussent-ils minoritaires, de même de la potentialité que des fonds d'investissement financiers s'intéressent à court ou moyen terme au rachat de la société.

La Cour de cassation censure la décision des juges d'appel. Ils ne pouvaient en effet condamner les dirigeants pour déloyauté sans avoir constaté que, à l'époque de la cession des titres des actionnaires minoritaires, ils détenaient des informations, qu'ils pouvaient seuls connaître, de nature à influer sur le consentement de ces actionnaires ni que, à cette date, des négociations étaient en cours en vue de la revente globale des actions. En d'autres termes, l'obligation de loyauté mise à la charge du dirigeant porte sur la révélation d'informations dont il est le seul à avoir connaissance.

Cass. com. 12 avril 2016, n° 14-19200

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