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Compta-Audit

Baromètre des experts-comptables : stabilité de l'activité des TPE-PME entre les premiers trimestres 2024 et 2023

Le Conseil national de l'Ordre des experts-comptables (CNOEC) a publié son baromètre « Image PME », à savoir les chiffres de l'activité économique des TPE-PME, pour le 1er trimestre 2024 : leur chiffre d'affaires est stable par rapport au 1er trimestre 2023. Ces résultats ne tiennent, toutefois, pas compte de l'inflation, qui a augmenté significativement depuis fin 2021, même si elle tend à se réduire.

Source et méthodologie de l'étude - Le baromètre des experts-comptables présente les chiffres d'affaires (CA) déclarés par les TPE-PME sur leurs télédéclarations de TVA, mensuelles ou trimestrielles, et intégrés dans la base de données Statexpert, avec les autres télédéclarations fiscales et sociales réalisées par les experts-comptables pour le compte des TPE-PME.

Composition de l'échantillon analysé. Les données trimestrielles sont basées sur un échantillon d’environ 580 000 entreprises au niveau national, présentes lors d’un trimestre analysé et lors du même trimestre de l’année précédente. En sont exclues les entreprises dont le CA mensuel ou trimestriel dépasse 3 fois l'écart-type du CA mensuel ou trimestriel moyen des entreprises du même secteur d'activité ou dont le CA annuel est supérieur à 50 M€. Les évolutions sont calculées en glissement annuel (une période par rapport à la même période de l'année précédente) et corrigées des jours ouvrés (voir dépêche https://rfcomptable.grouperf.com/actu/51611.html ).

Indicateurs de mesure utilisés. Les indicateurs utilisés sont ceux qui ont été créés au 3e trimestre 2020, dans le contexte de crise sanitaire (voir dépêche https://rfcomptable.grouperf.com/actu/46485.html ) :

-l'indice de chiffre d'affaires (ICA), qui mesure l'évolution du CA moyen par entreprise entre un trimestre et le même trimestre de l'année précédente. L'ICA est affiché, dans le baromètre, en base 100 en N-1. Un ICA de 102,1 signifie donc une augmentation de 2,1 % par rapport à la même période de l'année précédente ;

-l'indice de chiffre d'affaires cumulé (ICAC), qui mesure cette évolution entre le 1er trimestre et le dernier trimestre disponible de l'année N, comparativement à la même période de l'année N-1. Dans les graphiques, l'ICAC est affiché en évolution en %.

Prise en considération des effets de base. Un effet de base peut survenir lorsque l’évolution d’une variable entre N et N-1 varie non pas en raison d’une variation du niveau de la variable entre ces 2 dates, mais principalement en raison de l’évolution antérieure (entre N-1 et N-2). À titre d'exemple, si une entreprise a subi une forte baisse d’activité entre N-1 et N-2, alors il y a plus de chance que l’évolution soit positive entre N et N-1.

Pas de prise en compte de l'inflation. Précisons, toutefois, que les résultats ne sont pas corrigés de l'inflation, qui a progressé significativement depuis la fin de l'année 2021. En effet, selon les résultats de l’INSEE, l’indice des prix à la consommation a augmenté de 2,3 % en mars 2024 sur les 12 derniers mois. Le taux d'inflation tend donc à se réduire après les fortes croissances de 2023, notamment avec le ralentissement de la hausse des prix sur l'alimentation, les services, le tabac, l'énergie et les produits manufacturés. Il a toujours un impact sur le CA en valeur mais celui-ci est plus limité.

Stabilité du chiffre d'affaires des TPE/PME au 1er trimestre 2024 - Au 1er trimestre 2024, l'indice de chiffre d'affaires (ICA) des TPE-PME françaises de l'échantillon a été de 100, soit un chiffre d'affaires en valeur stable par rapport au 1er trimestre 2023. Il s'agit, ainsi, du second trimestre consécutif de stagnation de l'activité.

Ce résultat moyen masque, néanmoins, des disparités en termes géographique et sectoriel (voir ci-après).

Au 1er trimestre 2024, les TPE-PME de la moitié des régions ont affiché une légère hausse d'activité en valeur et l'autre moitié une légère baisse. Les entreprises de Normandie ont enregistré la plus forte croissance de CA en glissement annuel (+ 1,2 % en valeur). Elles sont suivies par celles de Bretagne (+ 0,9 %), d'Auvergne-Rhône-Alpes (+ 0,8 %) et des Pays de la Loire (+ 0,6 %). Celles de Centre-Val de Loire (+ 0,3 %), de Grand Est (+ 0,3 %) et des Hauts-de-France (+ 0,1 %) ont également affiché un résultat légèrement supérieur à la moyenne française. En revanche, les structures de Bourgogne-Franche-Comté (- 0,1 %), de la Réunion (- 0,1 %), d'Occitanie (- 0,4 %), d'Île-de-France (- 0,4 %) et de Nouvelle-Aquitaine (- 0,6 %) ont enregistré de légères diminutions de CA. Les TPE-PME de Corse (- 1 %) et de Provence-Alpes-Côte d'Azur (- 1,2 %) ont affiché les baisses les plus importantes.

Analyse détaillée de l'activité par secteur - Le baromètre « Image PME » du 1er trimestre 2024 a analysé l'évolution de l'activité de plusieurs secteurs, via les indices ICA et ICAC définis ci-avant.

Secteurs dont le CA a augmenté par rapport au 1er trimestre 2023. Pour les secteurs suivants, l'activité a été en hausse au 1er trimestre 2024 par rapport au 1er trimestre 2023 :

-les 3 000 commerces de détail de viandes et de produits à base de viande en magasin spécialisé de l’échantillon ont affiché une augmentation de CA de 5,8 % en valeur au 1er trimestre 2024. Malgré ces bons résultats, le cabinet d’études Xerfi prévoit une croissance modérée du chiffre d’affaires du secteur en 2024 (+ 2 % en valeur). Selon lui, le ralentissement de l’inflation ne devrait pas déboucher sur de substantiels gains de pouvoir d’achat pour les ménages. Les arbitrages de consommation défavorables à l’achat de viandes et produits carnés devraient, ainsi, perdurer dans certains foyers, et d’autant plus en boucherie ;

-les 10 370 pharmacies de l’échantillon ont enregistré un 4e trimestre consécutif de croissance : + 5,6 % au 1er trimestre 2024 par rapport au 1er trimestre 2023. Cette hausse est en partie liée à un effet de base favorable, avec la nette baisse d’activité affichée un an plus tôt. La baisse du nombre de pharmacies se confirme, selon le site vie-publique.fr : chaque mois, ce sont 25 pharmacies qui ferment et le pays a perdu près de 4 000 pharmacies entre 2007 et 2023. Cette diminution renforce la désertification médicale qui ne doit pas uniquement être regardée sous l’angle de l’accès difficile aux médecins. Par ailleurs, selon l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), en 2023, près de 5 000 signalements de ruptures ou risques de ruptures de stocks de médicaments et de produits de santé ont été enregistrés, soit une hausse de plus de 30 % par rapport à 2022 (https://ansm.sante.fr/actualites/plan-hivernal-point-de-situation-sur-lapprovisionnement-des-medicaments-majeurs-de-lhiver) ;

-les 6 666 TPE-PME de boulangerie-pâtisserie de l'échantillon ont enregistré une nouvelle hausse de CA de 4,8 % (en valeur) au 1er trimestre 2024 comparativement au 1er trimestre 2023. Cette augmentation démontre la capacité des entreprises du secteur à faire face à l’inflation. En effet, si le taux d’inflation tend à se réduire, les prix restent à un niveau élevé et impactent toujours le secteur, très consommateur d’énergie et de matières premières. Par ailleurs, les boulangeries-pâtisseries artisanales font également face à la concurrence grandissante des boulangeries industrielles ou des grandes surfaces alimentaires, qui proposent des produits à des prix moins élevés grâce à la vente en grande quantité. Mais l’élargissement de l’offre, notamment le développement de la restauration salée et des boissons, constitue un moteur de croissance pour toutes les structures du secteur ;

-après la baisse du précédent trimestre, les 15 000 entreprises de coiffure de l’échantillon ont vu leur activité repartir à la hausse au cours du 1er trimestre 2024 (+ 3,4%). Ce résultat s’inscrit dans la tendance des défaillances mesurée par Altares (voir dépêche https://rfcomptable.grouperf.com/actu/53652.html ) : après avoir atteint des records début 2022 (+ 84 %) puis début 2023 (+ 49 %), le secteur parvient à limiter leur hausse à + 5 %. L’étude de marché Skema Conseil (Junior-Entreprise de SKEMA Business School, qui est une école de management) présente divers facteurs pouvant influer positivement ou négativement sur l'activité : d’un côté, l'arbitrage des clients sur les dépenses, l'espacement des visites, l'impact du télétravail ou du « do it yourself » (en français, « faites-le (par) vous-même »), un marché de plus en plus concurrentiel avec la coiffure à domicile, les chaînes low cost… et, de l’autre, l’émergence de nouveaux concepts et une diversification des services proposés (prestations forfaitaires de beauté, prestations haut de gamme ou spécifiques), mais également une nette hausse de la demande masculine, notamment pour les coupes de barbe. Dans ce contexte, Xerfi prévoit une hausse d’activité de 3 % sur l’année ;

-les 11 300 TPE-PME d’entretien et de réparation de véhicules automobiles légers de l’échantillon ont affiché un 10e trimestre consécutif de progression d’activité (+ 2,9 % en valeur par rapport au 1er trimestre 2023). Selon le baromètre Mobilians-Solware (éditeur de logiciels de gestion pour les professionnels de la réparation et du recyclage pour l'automobile), le CA reste porté par l’augmentation des prix liée à la hausse du coût des pièces mais aussi à celle du coût de la main d’œuvre qui progresse encore plus vite. De plus, les paniers moyens enregistrés dans les ateliers de mécanique et de carrosserie ont augmenté en janvier et février de respectivement + 5,8 % et + 5 % par rapport à 2023, en raison du vieillissement du parc automobile passé de 11,2 ans en 2014 à 12,5 ans en 2023 ;

-les 5 500 hôtels de l’échantillon ont enregistré une croissance de 2,9 % en valeur lors du 1er trimestre 2024. Pour Xerfi, l’année devrait être globalement positive pour les professionnels du secteur, avec une fréquentation qui progressera grâce au dynamisme des arrivées de touristes étrangers, et notamment de la clientèle asiatique, dans le prolongement de 2023. Et ce d’autant plus que la tenue des Jeux Olympiques incitera davantage de voyageurs étrangers à opter pour la destination « France » durant l’été 2024. Du côté de la clientèle professionnelle, la bonne tenue des réservations des entreprises, portée par la normalisation des déplacements professionnels et la multiplication des salons et séminaires, apportera un surcroît d’activité aux hôteliers ;

-les 6 500 TPE-PME du commerce de détail d’habillement en magasin spécialisé de l’échantillon ont enregistré une hausse de CA de 1 % en valeur au 1er trimestre 2024. Selon Xerfi, le marché français de l’habillement devrait continuer à décliner en 2024, après la baisse enregistrée en 2023. Face à la persistance de l’inflation, les ménages n’auront d’autres choix que d’opérer des arbitrages de consommation. Et il y a fort à parier que ce sera aux dépens de l’habillement (réduction de la fréquence des achats, recours à la seconde main, etc.), ce poste étant de facto l’un des premiers réduits en temps de crise ;

-les 23 400 restaurants traditionnels de l’échantillon ont vu leur activité stagner au 1er trimestre 2024 (+ 0,8 %). Pour Food Service Vision (leader en Europe de l’intelligence économique de la filière restauration), qui publie sa Revue stratégique, le début d’année n’a, effectivement, pas été très porteur pour le secteur. Si la fréquence des visites s'est maintenue sur les trois premiers mois de l’année, les clients ont, toutefois, arbitré sur le contenu de leur repas : 56 % d’entre eux ont sacrifié au moins une composante (en majorité l’entrée). En dépit de ce démarrage en demi-teinte, Food Service Vision anticipe une hausse de CA pour le secteur en 2024, portée par une forte activité touristique et un maintien des flux professionnels ainsi qu’une inflation des cartes modérée voire stabilisée.

Secteurs dont le CA a baissé par rapport au 1er trimestre 2023. Pour les secteurs suivants, l'activité a été en baisse au 1er trimestre 2024 par rapport au 1er trimestre 2023 :

-les 10 850 agences immobilières de l’échantillon ont vu leur activité continuer de se dégrader et ce, pour le 7e trimestre consécutif : - 20,5 % au 1er trimestre 2024 après - 20 % au 4e trimestre 2023. Selon le site Meilleurtaux, après avoir atteint un pic en fin d’année 2023, les taux d’intérêt sont sur une tendance baissière depuis le début de l'année 2024 (3,9 % sur 20 ans et 4 % sur 25 ans). Les banques sont repassées dans une phase de conquête client et sont prêtes à faire des efforts. Toutefois, le nombre de transactions devrait baisser de 10 % en 2024 selon la FNAIM (à 800 000 environ sur l'année). L’offre de biens disponibles se reconstitue et ne devrait plus constituer un frein, mais la baisse des prix doit s’accélérer pour redonner du pouvoir d’achat aux acheteurs ;

-les entreprises de maçonnerie restent les plus touchées du secteur du bâtiment par l’effondrement du logement neuf et du non résidentiel. Les 13 100 structures de l’échantillon ont affiché un CA en recul de 6,5 % au 1er trimestre 2024 après la baisse de 3,9 % du 4e trimestre 2023. Dans ce contexte, les défaillances sont en forte croissance, comme le constate Altares (voir dépêche précitée), qui révèle une hausse de près de 30 % des défaillances pour les entreprises du gros œuvre par rapport au 1er trimestre 2023 ;

-les 3 350 TPE-PME des transports de fret de proximité de l'échantillon ont affiché un 3e trimestre consécutif de baisse de leur CA : - 4,8 % en valeur au 1er trimestre 2024. La baisse de la consommation des ménages pèse sur la demande de transport de marchandises dans un contexte inflationniste tendu. Les prix élevés des carburants impactent également les marges et la trésorerie des entreprises du secteur. Par ailleurs, selon une note Xerfi Risk, les transports routiers de fret de proximité arrivent en 4e place des secteurs les plus à risque de défaillance en 2024 ;

-les 84 000 TPE-PME de la construction de l’échantillon ont vu la baisse d’activité s’accentuer lors du 1er trimestre 2024 : - 4,3 % après - 1,3 % lors du 4e trimestre 2023. Les difficultés se poursuivent avec une crise profonde dans le logement comme dans le non-résidentiel selon la Fédération Française du Bâtiment (FFB). Les mises en chantier reculent de 23,3 % en janvier 2024 en glissement annuel sur trois mois, en lien avec la production de crédit qui s’effondre de 38,3 % en février 2024. La Confédération de l'Artisanat et des Petites Entreprises du Bâtiment (CAPEB) indique que le segment de l’amélioration-entretien enregistre son premier recul en glissement annuel. Les difficultés d’approvisionnement semblent, elles, en train de se résorber, selon la Banque de France, et les coûts des matériaux et de l’énergie se stabilisent, selon la FFB, permettant de lisser les prix. Dans ce contexte, Altares révèle un nombre de défaillances des entreprises de construction en progression de plus de 30 % au 1er trimestre 2024 (4 419) par rapport au 1er trimestre 2023 (3 379) (voir dépêche précitée).

CNOEC, « Image PME : 1er trimestre 2024, Analyse nationale », mai 2024