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L’« économie de la fonctionnalité » : un nouveau modèle économique d’avenir pour les entreprises ?
Dans le cadre de l'économie circulaire, un modèle économique fondé sur la « performance d'usage » plutôt que sur la propriété se développe : l'« économie de la fonctionnalité ». Un groupe de travail en retrace les impacts pour les entreprises et les consommateurs et formule des recommandations pour en sécuriser le développement.
L'objectif : créer de la valeur en économisant les ressources
Un modèle économique à visée environnementale. – L’« économie de la fonctionnalité » repose sur la mise à disposition d’un usage plutôt que la possession d’un bien. Il ne s’agit plus d’acheter pour devenir propriétaire, mais de payer un service rendu à l’aide du bien. Le vendeur demeure donc propriétaire tout au long de son cycle de vie, mais offre un usage assorti d’un contrat qui permet d’assurer la performance et la robustesse du bien sur le long terme. Il a ainsi tout intérêt à l’allongement de sa durée de vie et à l’intensification de son usage.
Concrètement, cela peut par exemple consister en un service de location de vélos électriques assorti d’un contrat de maintenance et d’entretien régulier ou un service de mise à disposition, par une entreprise spécialisée dans l’entretien, de vêtements professionnels, à d’autres entreprises, avec un service d’entretien inclus (réparation, blanchisserie, etc.) après chaque utilisation du vêtement.
Contrairement à un simple modèle de location, cette approche qui s’inscrit dans le cadre de l’économie circulaire, est orientée vers des bénéfices en matière de transition écologique, notamment pour réduire la consommation de biens et de ressources.
Les impacts sur les pratiques commerciales des entreprises. – Le modèle est fondé sur l’usage d’un bien ou d’un service et non sur la production en volume et l’achat de biens. Cette approche permet d’ajuster l’offre au plus proche des besoins des clients tout en favorisant le réemploi, la réparation et l’entretien des biens utilisés. Les notions de « performance d’usage » et la dimension de « coopération » y sont centrales.
Dès lors, ce type de modèle économique suppose de faire évoluer les pratiques commerciales actuelles et implique notamment :
-un développement accru de l’écoconception qui consiste à intégrer la protection de l'environnement dès la conception des biens ou services ;
-un essor des activités de logistique et de maintenance ;
-une évolution du modèle comptable ;
-des transformations dans certains métiers (marketing, vente) ainsi que dans la relation client.
Les préconisations pour un développement sécure du modèle
Les recommandations d'un groupe de travail. – Dans le cadre de la planification écologique pour l'économie circulaire, la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) a été sollicitée pour mener une réflexion sur le développement et la sécurisation de ce modèle.
Pour ce faire, la DGCCRF s'est appuyée sur un groupe de travail du Conseil national de la consommation (CNC) qui a rendu, le 18 septembre 2024, un avis comportant 10 recommandations.
Des mesures de protection des consommateurs. – Dans son avis, le CNC fait un premier constat : un nouveau cadre juridique dédié à ce modèle n'est pas requis et car les règles actuelles, posées par le code de la consommation et le code civil, assurent au consommateur-usager, une protection à la hauteur de celle dont bénéficie le consommateur qui achète un bien ou un service classique.
Les travaux du CNC font néanmoins ressortir deux besoins essentiels d'informations du consommateur, à savoir : celle sur les caractéristiques essentielles d’une offre d’économie de la fonctionnalité et celle sur les prix en lien avec la notion d’usage et de performance.
Pour y répondre, les recommandations n°1 à 4 préconisent de :
-garantir l’application pleine et entière du droit de la consommation, notamment en matière d’information du consommateur ;
-préciser les modalités prévues en cas de dysfonctionnement du bien et disposer d’un service client efficient et adapté à l’économie de la fonctionnalité ;
-assurer un niveau élevé de transparence sur la souscription d’assurances ;
-s’assurer de la finalité et du caractère proportionné de la collecte des données nécessaires au service.
Un accent particulier sur l’enjeu environnemental. – Ce nouveau modèle économique répond à des attentes en matière de transition écologique et de consommation responsable. Afin d'assurer et faire ressortir ces objectifs, les recommandations n° 5 à 7 invitent ainsi à :
-travailler à des méthodologies adaptées aux besoins des entreprises de l’économie de la fonctionnalité pour l’évaluation des impacts environnementaux et sociaux et leur prise en compte dans les modèles tarifaires et de financement ;
-rendre perceptible dans les contrats et la communication des entreprises l’intérêt pour les consommateurs et pour l’environnement de choisir une offre d’économie de la fonctionnalité ;
-mieux faire connaître l’économie de la fonctionnalité au grand public.
Des mesures pour les professionnels. – Enfin, les trois dernières recommandations (n° 8 à 10) visent à la fois à assurer une pratique vertueuse du modèle en le rendant attractif pour les entreprises en :
-formant et accompagnant les acteurs/mettant en avant les bonnes pratiques ;
-développant le financement et les incitations économiques publiques favorables à ou compatibles avec l’économie de la fonctionnalité ;
-facilitant les signalements et assurant un contrôle des acteurs.
Avis « Développement et sécurisation de l’économie de la fonctionnalité » du 18/09/2024 ; https://www.economie.gouv.fr/cnc/adoption-de-lavis-developpement-et-securisation-de-leconomie-de-la-fonctionnalite