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Entrepreneur individuel

Résidence principale : l'entrepreneur qui s'oppose à sa saisie doit prouver qu'il y habite

Lorsqu'un entrepreneur individuel placé en liquidation judiciaire se prévaut de l'insaisissabilité de sa résidence principale pour s'opposer à la vente forcée d'un de ses biens immobiliers, il lui revient de prouver qu'il l'occupait en tant que telle au jour du jugement d'ouverture de la procédure.

Un liquidateur judiciaire saisit un bien immobilier appartenant à un entrepreneur individuel

Un entrepreneur individuel, qui exploitait son activité en Guadeloupe, est placé en redressement judiciaire fin juin 2017, puis en liquidation judiciaire 6 mois plus tard. Sur requête du liquidateur, le juge-commissaire ordonne la vente par adjudication d'un de ses biens immobiliers situé dans le Val d'Oise. Soutenant qu'il s'agit de sa résidence principale, l'entrepreneur s'oppose à la vente forcée mais les juges confirment l'ordonnance du juge-commissaire.

L'entrepreneur se pourvoit alors en cassation.

Pour mémoire, la résidence principale d'un entrepreneur individuel est de droit insaisissable par ses créanciers professionnels (c. com. art. L. 526-1). Encore faut-il qu'il l'occupe en tant que telle au jour du jugement d'ouverture de la procédure collective (cass. com. 18 mai 2022, n° 20-22768).

Le bien saisi correspond-il à la résidence principale de l’entrepreneur ?

La charge de la preuve incombe à l'entrepreneur

Les juges d'appel reprochaient à l'entrepreneur de ne pas avoir apporté suffisamment d'éléments pour prouver qu'il habitait bien l'immeuble saisi.

Pour se défendre, l'entrepreneur rétorque que c'est à celui qui demande la vente du bien immobilier de prouver que l'immeuble ne constitue pas sa résidence principale.

Faux, lui répond la Cour de cassation. Il revient à celui qui se prévaut de l'insaisissabilité des droits qu'il détient sur un bien immobilier où est fixée sa résidence principale, de rapporter la preuve qu'à la date du jugement d'ouverture de la procédure collective, l'immeuble constituait bien sa résidence principale.

Toutes les preuves ne se valent pas

De son côté, l'entrepreneur reprochait aux juges d'appel d'avoir établi une hiérarchie entre les éléments de preuve versés au débat.

Pour confirmer la vente forcée du bien immobilier, les juges se sont fondés sur des pièces rapportées par la direction des finances publiques, lesquelles attestaient que l'entrepreneur n'avait jamais versé de taxe d'habitation à titre personnel pour ce bien, la taxe ayant été émise au nom de locataires.

Or, l'entrepreneur estimait avoir suffisamment prouvé qu'il s'agissait de sa résidence principale, au moyen :

-d'un certificat de travail attestant de son emploi, du 1er juin 2017 au 31 mai 2018, dans une commune limitrophe de celle où était situé le bien litigieux ;

-de bordereaux reçus à l'adresse du bien litigieux et listant les remboursements dont il avait bénéficié par l'assurance maladie du Val d'Oise, pour la période du 9 mai 2017 au 9 novembre 2018 ;

-de l'attestation de droits à l'assurance maladie du Val d'Oise, envoyée à cette même adresse, le 4 août 2017 ainsi que de la carte de tiers-payant pour l'année 2017.

La Cour de cassation repousse, là aussi, l'argumentaire de l'entrepreneur. Étant donné l'exploitation personnelle du fonds de commerce par l'entrepreneur en Guadeloupe et l'identité des débiteurs de la taxe d'habitation, les juges ont pu souverainement déduire que le bien litigieux n'était pas sa résidence principale.

Cass. com. 14 juin 2023, n° 21-24207