Social
Durée du travail
La preuve des heures supplémentaires ne doit pas peser sur le seul salarié
En cas de litige relatif à l'existence d'heures de travail, le salarié doit présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures qu'il prétend avoir accomplies. Cette exigence ne doit pas faire peser sur lui seul la charge de cette preuve et l’employeur doit y répondre avec ses propres éléments. Illustration dans une affaire jugée le 19 octobre 2022, avec un salarié qui produisait des attestations de collègues sur ses heures d’arrivée et de départ.
Preuve partagée des heures supplémentaires
En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, la charge de la preuve est partagée entre le salarié et l’employeur (c. trav. art. L. 3171-4).
Éléments avancés pas le salarié. - Pour que sa demande soit prise en considération, le salarié doit présenter a minima « des éléments suffisamment précis » pour permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments (cass. soc. 18 mars 2020, n° 18-10919 FPPBRI).
Cette exigence « d’éléments suffisamment précis » ne doit cependant pas aboutir à faire peser sur le seul salarié la charge de la preuve des heures accomplies (cass. soc. 27 janvier 2021, n° 17-31046 FPPBRI).
Réponse de l’employeur. - En retour, l’employeur doit fournir au juge des éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié (c. trav. art. L. 3171-4 ; cass. soc. 10 mai 2007, n° 05-45932, BC V n° 71).
En pratique, il produit des propres éléments issus du contrôle des heures de travail qui est à sa charge (cass. soc. 18 mars 2020, n° 18-10919 FPPBRI).
Au final, le juge forme sa conviction en fonction des éléments produits par les parties, sachant qu’il peut le cas échéant ordonner toute mesure d’instruction qu’il estimerait utile.
Degré de précision des éléments produits par le salarié
Éléments présentés. - Dans cette affaire où un salarié réclamait le paiement d’heures supplémentaire, la cour d’appel a estimé que les éléments produits par lui n’étaient pas suffisamment précis pour étayer sa demande. Elle a relevé :
-l'imprécision quant aux heures et jours exacts alors que le salarié aurait pu être en déplacement ;
-la non-production par le salarié d’un tableau hebdomadaire reprenant ses horaires de travail ;
-ainsi que la non-production de mail de début ou fin de journée permettant de déterminer leur amplitude horaire, d’agenda professionnel ou d’autre élément apportant un commencement de preuve ou une preuve de la réalisation de 5 heures supplémentaires de travail par semaine.
La cour d’appel avait bien constaté que le salarié produisait les attestations de collègues témoignant « de son arrivée vers 7h/7h15 le matin et de son départ vers 18h30/19h en fin de soirée ». Mais elle avait considéré ces indications comme imprécises, puisque le salarié pouvait être en déplacement.
Éléments suffisamment précis. - Pour la Cour de cassation, le salarié avait présenté des éléments suffisamment précis pour permettre à l'employeur de répondre, et ce dernier n’ayant pour sa part produit aucun élément de contrôle de la durée du travail.
Elle reproche donc à la cour d'appel d’avoir fait peser la charge de la preuve sur le seul salarié.
L’arrêt est cassé et l’affaire devra être rejugée.
Cass. soc. 19 octobre 2022, n° 21-18093 D